Trek : tour du Ruan en autonomie
2 août 2014 : après 800 kilomètres nous voilà à Sixt-Fer-à-Cheval sous une pluie battante pour découvrir la région pendant un trek d’une semaine autour du Ruan. C’est notre premier trek en montagne et vu les prévisions météo catastrophiques cette année (l’été le plus moche depuis une quinzaine d’années sur la période 15 juillet – 15 août d’après les locaux) nous avions prévu de boucler notre tour en une dizaine de jours lors sa préparation. Le but étant de dormir en tente et d’emporter notre nourriture pour minimiser les coûts. L’itinéraire que j’ai réalisé n’est pas l’itinéraire classique du tour du Ruan qui se fait normalement en 4 à 6 jours. Ici nous ne passerons pas par le lac d’Anterne mais nous ferons un détour par le désert de Platé à l’est. Une autre variante consiste à passer par le col de Cou et Samoëns en longeant les Dents Blanches pour le retour vers Sixt. Le tour mesure 105km pour 9000m de dénivelé positif avec 8 cols à plus de 2000m d’altitude à gravir. Chargés et en autonomie complète, une bonne condition physique est nécessaire pour le réaliser.
105km et 9000m de D+, entre la France et la Suisse.
La trace GPS du parcours au format Kmz (Google Earth) est disponible en téléchargement en cliquant ici.
Le matos
Voici une liste du matos emporté pour ce trek :
– Sac Quechua Forclaz 70+10L
– Chaussures Salewa Alp Trainer Mid GoreTex (je n’ai pas eu les pieds mouillés malgré la traversée de nombreux cours d’eau et la semelle Vibram a bien tenu le coup)
– Veste hardshell Odlo Phantom (légère, imperméable et respirante mais un peu fragile)
– 2 t-shirt manche courte
– 1 t-shirt micro polaire manche longue
– 1 pantalon léger + 1 short
– 1 chapeau
– 2 paires de chaussettes rando + une de nuit
– Collant thermique et un maillot thermique pour la nuit (sous-vêtement moto)
– Paire de gants (utilisés le matin pour ranger le bivouac et la nuit pour les nuits les plus fraiches)
– Tour de cou multi-usages (remplace le traditionnel bonnet trop chaud)
– Tente 3 places Husky Sawaj 3 (une tente dôme spacieuse avec un plafond à 130cm, parfaite pour les grands mais un peu lourde : 2,9 kilos)
– Sac de couchage Quechua light 0°
– Tapis de sol basique en mousse Quechua M100
– Sac de soie pour garder le sac de couchage propre et avoir un apport thermique supplémentaire
– Popotte Quechua alu / 2 bols en plastique / 1 réchaud Primus Express Stove / 1 bouteille de gaz Primus 230g
– 2 bouteilles d’1,5L en PET solide (type bouteille de Coca ou Ice Tea)
– Serviette de rando séchage rapide + petit torchon
– Couteau suisse
– Couvertures de survie
– Panneau solaire Goal Zero Nomad 7 et batterie Guide 10 pour recharger téléphone et caméra
– Gopro Hero 3 : Black édition
Avec la nourriture cela donne un sac de 19 kilos au départ du trek. C’est surtout la quantité importante de nourriture emportée qui pèse le plus, sans compter le poids du sac en lui même (2,4kilos) mais il me fallait beaucoup de volume pour emporter le matériel comme le sac de couchage qui prend beaucoup de place : 1,4 kilos pour mon 0° en synthétique à 80€. Pensez à investir directement dans un sac de couchage en plumes si vous avez les moyens, deux fois moins lourd et moins volumineux.
La nourriture
Voici une photo de ce que nous avons emmené en terme de nourriture, ça parait énorme, mais une fois les emballages supprimés et les ingrédients transférés dans des sachets ziplock le volume est divisé par 2. Comme nous étions parti pour 10 jours et que nous avons bouclé le trek en 8 (du dimanche matin au dimanche soir), il nous restait pas mal de nourriture à la fin de l’aventure… sans compter qu’on a raté pas mal de repas chauds car nous n’étions pas dans des conditions favorables pour sortir le réchaud (dans une ascension ou en haut d’un col exigu et exposé au vent par exemple).
Le ravitaillement pour 10 jours avant déballage et transfert dans les ziplocks.
La leçon à tirer pour la prochaine fois est d’emporter moins de nourriture à réchauffer et de se contenter de manger froid et léger le midi : fruits sec, pâtes de fruit, protéines en poudre, saucisson… Le matin nous mangions un bol de flocons d’avoine Quaker Oats avec du lait en poudre complété par des compléments protéinés Mass Gainer Aptonia (Décathlon) et quelques fruits secs. Les repas chauds étaient essentiellement constitués de nouilles chinoises ou de coquillettes cuisson rapide agrémentées d’huile d’olive, de paprika et de concentré de tomate en tube ou de dosettes de Ketchup récupérées chez Mac Do. Un repas sympa que nous avons réalisé également pour la première fois : de la semoule avec un sachet de Chorba (soupe Marocaine), quelques raisins secs et vous aurez un délicieux couscous de trek (si vous avez la possibilité d’acheter quelques légumes en plus sur la route c’est le top !). La semoule à l’avantage de gonfler énormément à la cuisson et donc d’avoir un volume très contenu pour le transport.
Le parcours
Jour 1
Départ du parking du Lignon à Sixt où nous laisserons notre voiture pendant toute la durée du trek. Attention le parking est normalement très fréquenté, pas facile de trouver une bonne place. Le temps est pluvieux et la visibilité moyenne, nous montons jusqu’aux chalets de Sales en croisant de magnifiques cascades dont la cascade du rouget sur la route avant d’arriver au parking. La montée se fait dans les bois puis on longe la rivière jusqu’à arriver à une petite chapelle puis aux Chalets de Sales. Le décors change alors puisqu’on marche sur de nombreux lapiaz (roche calcaire érodée et formant des vaguelettes) puis on rejoint un plateau hébergeant des vaches à 1900m au lieu dit « Le grand pré ».
Les cascades en partant du Lignon.
Direction sud vers le dérochoir où nous empruntons par erreur la pointe du dérochoir pour rejoindre le col de la Portette. Pensez à bifurquer vers la droite (ouest) au niveau du croisement après le grand pré pour éviter de faire la même erreur que nous et vous retrouver sur ce passage délicat dans les éboulis à 19h… Il faut suivre l’itinéraire classique via le GR96.
Vue sur la ville de Passy depuis le passage du dérochoir.
On bivouac ensuite à 2230m non loin du col de la Portette avec une vue panoramique sur le désert de Platé et les rochers des Fiz à l’est. Un autre groupe campe quelques kilomètres plus bas au niveau du lac des Laouchets, on distingue leur minuscule tente. C’est bientôt l’heure de dormir, ma montre indique 7° à 21h, j’ai bien fait de prendre mon polaire… Pensez à ravitailler en eau au niveau des chalets de Sales car vous ne croiserez plus d’eau avant quelques kilomètres le jour suivant.
Eboulis au passage du dérochoir.
Jour 2
Direction le col de la Portette puis les chalets de Platé, l’ascension est facile car nous étions déjà assez haut la veille. Petite pause aux chalets de Platé histoire de boire un verre, nous n’avions plus d’eau depuis 18h la veille, il n’y a aucun point d’eau dans cette zone, même le refuge est alimenté uniquement avec la collecte des eaux de pluie. Nous sommes dans la zone du désert de Platé, non loin de la piste des Cascades, plus longue piste de ski d’Europe (14km).
Dernier regard sur la chaine des Fiz et le Dérochoir depuis le col de la Portette.
On entame la descente vers Plaine Joux. On part de 2000m pour arriver à environ 1300m d’altitude. La descente se fait le long d’une falaise avec de la roche très friable, soyez prudents j’ai vu quelques pierres tomber car les marcheurs ne font guère attention à l’endroit où ils mettent leurs pieds… la descente est plutôt difficile avec nos sacs de 19 kilos, après 1h30 j’ai les genoux explosés à cause des nombreux blocs à descendre, c’est la première grosse difficulté de l’aventure pour moi.
2000m, descente vers Plaine Joux depuis les chalets de Platé.
Bifurquez à gauche vers 1450m pour prendre la direction de Plaine Joux par les bois et vous ravitailler en eau au petit torrent. Vous êtes alors sur le GRTPMB en direction de la station Plaine Joux. On continue jusqu’au lac vert pour trouver un lieu de bivouac 1km après le gîte du Châtelet avec une très belle vue sur le Mont Blanc au niveau d’un groupe de chalets non habités. Il y a aussi possibilité de camper sur une air de camping publique à Plaine Joux mais l’accueil ferme à 18h00.
Jour 3
Direction le lac de Pormenaz à un peu plus de 2000m d’altitude. On passe à coté du village du Gouet puis l’ascension commence dans les alpages. Comptez une bonne heure pour monter jusqu’au lac en étant chargé.
Dans la montée vers le lac de Pormenaz.
Le sommet en passant par le passage le plus court est plutôt technique, il y a beaucoup d’échelles et de passages chainés. Je déconseille ce passage pour quelqu’un qui aurait le vertige ou pour des enfants car il est très aérien. On fait une petite pause au lac de Pormenaz vers 13h où pas mal de monde a déjà fini l’ascension avant de repartir vers le nord-est et le refuge d’Anterne.
On se réchauffe avec un thé au lait (3€20), l’accueil est bon mais le refuge est complet et pas mal de monde est déjà arrivé vers 15h, il y a donc beaucoup de mouvement dans le refuge et on ne va pas s’éterniser afin retrouver le calme des sentiers. Le décors est de plus en plus vert et moins rocailleux, on avance donc plus rapidement malgré le vent et la pluie qui fait son retour. Arrivés aux ruines des chalets d’Ecuelle puis aux chalets de Villy vers 19h00, c’est l’heure du bivouac ! On croisera deux randonneuses Suisses un peu perdues vers 20h30 et qui comme nous se plaignent du temps… elles sont en vadrouille dans les Alpes depuis un mois et on eu de la pluie quasiment tous les jours.
Jour 4
Réveille face au Mont Blanc dans la vallée entre les Aiguilles Rouges et la chaine du Mont Buet. Le beau temps est de retour et nous commençons l’ascension du col de Salenton (2526m). La montée est régulière et se termine en zig-zag sur un terrain lisse mais assez friable.
Bivouac face au Mont Blanc depuis les chalets de Villy.
2h plus tard nous y sommes, on ne s’attarde pas vu les rafales de vent qui soufflent au col, le Mont Buet est visible sur notre gauche à 3000m mais nous commençons la descente vers le refuge de la Pierre à Bérard.
Col de Salenton (2525m), à gauche le Mont Buet, à droite les Aiguilles Rouges.
La descente se fait à travers de nombreux blocs de taille importante sans chemin tracé et sur un pente assez raide. On est un peu perdu et la descente se fait avec hésitation avant de rejoindre un groupe qu’on suivra pendant une partie du trajet. De nombreux bouquetins sont présents dans cette zone avec leurs petits et sont peu farouches, c’est génial de pouvoir les admirer de si près.
De nombreux bouquetins dans la descente vers Le Buet.
Après le refuge comptez encore 2 heures pour descendre jusqu’au village du Buet à travers la forêt. On espérait pouvoir bivouaquer mais impossible dans cette zone, il y a trop de dénivelé et de végétation.
Depuis le refuge de la pierre à Bérard on suit la rivière jusqu’au village du Buet dans une longue descente.
On arrive alors à bout de force au village vers 21h après avoir fait quelques sprints dans la forêt et on entre dans le premier hôtel venu pour y passer la nuit. Par chance il restait encore une chambre libre (39€ la nuit, wc et douche sur le palier) à l’hôtel du Buet. Une nuit de repos et une bonne douche nous attendent, l’équipe de l’hôtel est très sympa et on repart avec une carte d’hôte nous permettant de prendre le train et le bus gratuitement entre Vallorcine et Chamonix. Un petit détour par Chamonix s’impose donc demain matin…
Jour 5
On commence par un peu de tourisme à Chamonix en début de journée. Le contraste est saisissant entre les petits villages et Chamonix beaucoup plus touristique et cosmopolite. On croise un nombre incalculable de boutique de marque de montagne : Salomon, Millet, The North Face… l’envie de faire un peu de shopping est grande mais nos sacs sont déjà remplis et nos bourses vides.
Un peu de tourisme à Chamonix !
Puis retour vers Vallorcine pour commencer l’ascension du col de la Terrasse pour rejoindre le barrage d’Emosson en Suisse. Nous avons mis presque 3h pour rejoindre le col. Difficile de trouver un bivouac à 21h en pleine tempête… on se réfugie alors dans la chapelle du lac d’Emosson pour y passer une partie de la nuit après avoir traversé le barrage. Deux campeurs ont déjà plantés leur tente une vingtaine de mètres plus bas.
Jour 6
Réveil à 5h30 après une nuit difficile. La vue sur le lac d’Emosson est magnifique, on se met en route vers 7h00 par les tunnels en direction du col de Barberine. Ces tunnels très sombres et en terre sont uniquement empruntés par les engins et les bergers habitant la cabane au fond de la combe.
Le lac d’Emosson depuis le col de Barberine (2481m).
Pas de soucis pour les emprunter. Continuez jusqu’au bout de la route sans bifurquer vers le fléchage « col de Bel Oiseau », le chemin se trouve après les cabanes. On croise 3 bergers en pleine dégustation de vin rouge / saucisses à 8h du matin, il faut bien se réchauffer 😉 On enchaine avec le col d’Emaney pour redescendre sur le lac de Salanfe.
Passage du col de Barberine, le col d’Emaney se situe en face.
On trouve in-extremis un lieu de bivouac après avoir traversé la partie basse du lac, un orage éclate et on se retrouve trempés avant de pouvoir monter la tente. La chance n’est vraiment pas avec nous côté météo.
Descente vers le lac de Salanfe.
Jour 7
Montée du col de Susanfe à 2494m, le départ se fait au niveau du lac puis on rejoint des zones avec quelques passages chainés, le parcours est assez rocheux et escarpé pour finir sur une pente importante mais lisse ressemblant fortement aux terrils du nord de la France. On passe devant la cabane métallique du col disposant de deux couchages permettant de se réfugier en cas de mauvais temps puis on arrive au col très venteux.
Vu sur lac de Salanfe dans la montée du col de Susanfe (2494m), à droite les Tours Salières et le glacier noir.
Le Mont Ruan est dans la brume. Descente vers le refuge la Cabane de Susanfe puis direction les alpages Suisses par le Pas d’Encel où nous croisons de nombreuses chèvres qui nous barrent la route… On rejoint ensuite Barme en fin de journée pour bivouaquer.
Cabane dans la montée du col de Susanfe, le sommet est proche.
Jour 8
Les Dents Blanches depuis le Suisse non loin du village de Barme.
On rejoint le col de Cou par l’arête de Berroi très exposée au vent pour repasser en France. A notre gauche une magnifique vue sur les Dents Blanches. Une fois le col passé une longue descente (1200m de D-) commence vers Samoëns.
La croix d’Increne sur le crête de Berroi.
Le terrain est complétement différent puisqu’on emprunte un chemin 4×4 assez lisse. On cours une bonne partie de la descente avec nos sacs encore très lourds afin d’arriver à Sixt avant la tombée de la nuit. Petit plaisir du dernier jour : on décide de manger pour la première fois au refuge. Direction le refuge de Bostan, une énorme omelette ainsi qu’un plateau de fromage nous attendent et nous permettent de reprendre de l’énergie pour la fin de la descente. Ça change des pâtes !
Dernier regard sur la crête de Berroi et les Dents Blanches avant de passer en France par le col de Cou (1920m).
Arrivés à Samoëns, une voiture nous klaxonne… une personne qu’on a croisé au refuge nous a reconnu et nous propose de nous déposer à Sixt pour éviter de marcher sur la longue route départementale, sympa ! Il nous reste donc à récupérer notre voiture au parking du Lignon afin de terminer cette aventure.
Bilan : malgré la météo très capricieuse nous avons découvert des paysages grandioses et très diversifiés : les cascades de Sixt, le désert de Platé, le milieu très minéral des hautes cimes du Ruan, les lacs, les alpages Suisse… Un dépaysement total et de belles rencontres (autant humaines qu’animales !) qui nous laissent d’agréable souvenirs de la région. Quelques jours seront nécessaires pour nous remettre complétement d’aplomb d’un point de vue physique, surtout au niveau des genoux, mais le jeu en vaut la chandelle !
Retrouvez les photos du trek sur mon compte Flickr !
Bonus : un bouquetin prêt à nous charger du côté du barrage d’Emosson, un demi tour s’impose !
[…] globalement emporté le même matériel que lors de mon trek autour du Ruan, des chaussures de randonnées hautes ne sont toutefois pas forcement nécessaire, le terrain est […]